• Je ne suis pas médusé !

    Pour lire un texte et en saisir tout le sel, il faut avoir une solide culture générale. On ne sera pas médusé par cette affirmation, qui semble aller de soi, mais on peut en mesurer toute la portée en lisant le texte de Hirsch, La compréhension en lecture requiert la connaissance des mots et des choses, qui a d'ailleurs bâti toute une série de programmes scolaires et d'écoles sur ce postulat. 

    Plus on acquiert de culture, plus on peut faire de relations entre les éléments d'un texte ou entre un texte et un autre. Un exemple ci-dessous avec cet extrait d'Astérix Légionnaire.

     

    je suis médusé

    Goscinny, Uderzo, Astérix légionnaire, 1967.

     

    Télécharger « je suis médusé.jpg »

     

    L'on y voit les fameux pirates de la BD sur un radeau de fortune, complètement anéantis, désespérés, à bout de forces physiques et morales, deux d'entre eux agitant tristement leur mouchoir en direction du navire détruit par Astérix et Obélix en train de sombrer rapidement dans les profondeurs de l'océan. Encore une fois surpris par les Gau... les GauGau ... les Gaulois alors qu'ils croyaient avoir affaire à une simple galère romaine, encore une fois copieusement roués de coups, on peut comprendre que les pirates soient médusés, c'est-à-dire frappés de stupeur, paralysés comme ceux qui voyaient le visage de la Méduse dans la mythologie grecque. 

     

     

    Carlos Schwabe, Méduse, 1895.

     

    Mais si ces mésaventures leur arrivent très fréquemment, c'est-à-dire quasiment à chaque épisode, pourquoi finalement être "médusés" plutôt que "désespérés", "liquéfiés", "frappés d'horreur", "accablés" ? C'est que les auteurs ont voulu faire un clin d’œil au lecteur, un jeu de mots. "médusés" --> Radeau de la Méduse (le célèbre tableau).

     

    JEAN LOUIS THÉODORE GÉRICAULT - Le Radeau de la Méduse (Musée du Louvre, 1818-19).jpg

     Théodore Géricault, Le Radeau de la Méduse, 1819.

     

    Et à son tour, la comparaison des deux images sera source d'amusement pour le lecteur.

    L'accès à ces différents degrés de lecture dépend donc non seulement de l'intelligence du lecteur mais aussi de sa mémoire culturelle, les deux étant de toute façon difficilement discernables dans ce domaine, la lecture, comme dans celui des échecs ou dans bien d'autres champs d'expertise (cf. A. Lieury, "Mémoire et intelligence ne font-elles qu'un ?").

     

     

    « 6 juin 1944 : le débarquement (Marc Rosnais)Dans les forêts vierges »

  • Commentaires

    1
    Lundi 13 Juin 2016 à 15:39

    A moi d'être médusée. C'est excellent! De même que l'article référencé ;)

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :