• [Pour le collège] Les manuels "Terre des Lettres"

    Véronique Marchais a écrit plusieurs textes très intéressants que vous pouvez retrouver sur le blog Rédaction au primaire : 

     

    Elle est également co-auteur d'une série de manuels de lettres allant de la 6e à la 3e, Terre des Lettres.

    Voici sa présentation musclée de la nouvelle mouture du manuel à l'occasion de la refonte exigée par les nouveaux programmes qui entreront en vigueur à la rentrée 2016. Rappelons que la 6e sera alors intégrée au cycle 3 avec le CM1 et le CM2. 

     

     

    Véronique Marchais :

    "Tous les éditeurs vous tiennent en substance le discours suivant : "N'ayez pas peur, la réforme va très bien se passer, d'ailleurs, nous sommes là pour vous accompagner." 

    Il nous était moralement impossible à nous, auteurs de TDL, qui avons passé l'année à nous battre pour préserver la qualité et le contenu du manuel, sans rien céder sur tout ce que cette réforme a de démagogique et de ravageur, de faire ainsi allégeance à des textes que nous avons combattus et combattons encore.

    Voici donc la réponse que nous avons faite à notre éditeur :

    Il est hors de question en ce qui nous concerne de venir benoîtement discourir sur la façon dont TDL devrait faire passer la pilule de la réforme. Il n'y a rien à faire passer du tout. Cette réforme est une escroquerie à combattre. Catherine, Anne-Christine, Claire-Hélène et moi-même la combattons depuis  un an par tous les moyens possibles, dans nos établissements, sur les forums, dans la rue, dans les médias, au CSP... TDL est une partie de ce combat.
    Terre des Lettres, c'est le refus de la logique de cycles, de compétences, le refus de la négation du caractère structurant de la grammaire, le refus de limiter certaines conjugaisons à la troisième personne, de faire disparaître les groupes verbaux, de remplacer COD et COI par de vagues compléments de verbe, le refus de transformer la littérature en exercice de communication mâtiné de moraline !

     

    Si nous pouvons dire tout cela très clairement, sans avoir à donner dans la langue de bois, avec toute la vigueur que nécessite la dénonciation d'une réforme condamnée par le Sénat, l'Académie tout entière, et tous les intellectuels éclairés du pays, alors nous pouvons envisager une vidéo. Mais nous n'y accepterons de censure d'aucune sorte, et il faut que Nathan soit prêt à assumer notre position.
    En tout cas, nous ne tiendrons aucun autre discours que celui-ci. Si cette proposition ne vous agrée pas, notre protestation sera silencieuse, mais sera.


    La suite, vous la devinez. Cette liberté que nous réclamions, nous sommes fières de l'avoir mise en oeuvre dans TDL, mais nous n'avons pu l'obtenir pour nous exprimer sur le site de Nathan dans le cadre du lancement des nouvelles collections. Nous voilà donc effectivement du côté de la contestation silencieuse.

    Mais le silence, c'est pas top, pour faire connaître notre travail, un travail pour lequel nous nous sommes tant battues. Alors je vous le dis ici.

    TDL sera peut-être le seul manuel de Lettres :

    • qui ne remplace pas les œuvres universelles par de la littérature jeunesse ;
    • qui refuse d'enfermer l'interprétation des œuvres dans des thèmes préétablis ;
    • qui ne réduit pas la grammaire à de vagues manipulations ;
       
    • qui refuse de ramener COD et COI à de simples compléments de verbe, d'ignorer les groupes verbaux, la conjugaison à toutes les personnes...
       
    • qui défend plus que jamais une grammaire structurée et structurante ;
       
    • qui développe encore et encore sa pédagogie de l'écrit, parce que qui peut le plus (s'exprimer à l'écrit) peut le moins (s'exprimer à l'oral) ;
       
    • qui réaffirme sa foi dans les grands textes, capables d'emporter les élèves et de les nourrir dans le déploiement de toutes leurs richesses (et non d'un seul thème) ;
       
    • garanti sans socle commun, sans items à la c éparpillés un peu partout, sans orthographe rectifiée, sans OGM et sans pesticides. Fait à la main, par une petite équipe, avec amour et conviction, pas juste pour répondre à la sacro-sainte "commande ministérielle".

      Voilà, je vous ai fait l'article.

      Je précise que tout ce que nous avons refusé de faire (manuel de cycle, travail à partir du socle, littérature jeunesse...), l'éditeur l'a fait faire par d'autres auteurs, dans une autre collection. Et que l'an prochain, il n'en restera qu'une. Et que je vous jure qu'avec ou sans promo, je me battrai de toutes mes forces pour que ce soit nous, et pas un torchon qui réunit tout ce que j'abhorre. Et je compte un peu (euh... en vrai ? beaucoup) sur vous pour ça.

      Nous n'avons que le bouche-à-oreille. Si notre combat est aussi le vôtre, parlez de nous, diffusez ce message.

      Même pas désolée pour la pub éhontée. Nous avons beaucoup travaillé pour offrir un travail de qualité : nous allons au bout.

      Merci."

    Source : http://www.neoprofs.org/t100457-des-nouvelles-de-terre-des-lettres

     



    Et sa version pdf pour large diffusion : https://goo.gl/GbrBGe

    (Merci à BlasterA1 et LuigiB pour l'image et l'affiche)

     

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    Un article de J.-P. Brighelli :

    Réforme du collège: les manuels de la Résistance (Le Point, 28 mars 2016)

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    Terre des Lettres résiste... (Véronique Marchais) 

    Sommaire de Terre des Lettres 6e


    chapitre 1 : Poésies pour célébrer le monde.
    C'est le même corpus que dans l'édition précédente, juste réorganisé en deux grands thèmes : la nature et le monde des hommes.

    chapitre 2 : Ogres et sorcières, créatures maléfiques ou initiatrices ? Une réflexion sur l'ambivalence de ces figures, à la fois opposantes et initiatrices à travers La Belle au Bois dormant (fées et sorcières comme figures du destin), Jeannot et Margot, Vassilissa la très belle (avec Baba Yaga), Le Chat Botté, Le Petit Poucet, et La Barbe bleue.
    Parcours de lecture ouvrant sur d'autres contes entrant dans la même problématique.

    chapitre 3 : Belles et Bêtes, du livre à l'écran. Un travail sur le motif du fiancé-animal dans le conte et sur l'adaptation cinématographique.
    - étude de La Belle et la Bête de Mme Leprince de Beaumont en regard du film de Cocteau ;
    - une étude du Lai de Mélion, variante de Bisclavret de Marie de France, histoire d'un chevalier qui se transforme en loup-garou, et l'adaptation de ce lai en court-métrage par Michel Ocelot.

    chapitre 4 : récits de création, en deux parties : la naissance du monde chez les Grecs (du chaos aux Olympiens et au partage de Prométhée, le déluge et Phaéton), et la genèse dans la Bible (les classiques : le poème de la création, Adam et Ève, Noé, Babel, Abraham) + un travail de mise en relation des textes (points communs et différences, émergence d'un ordre, rapport à la loi, conséquences de la transgression, danger de la démesure...)

    chapitre 5 : Face au monstre, ou le rapport entre le monstre et le héros, qui n'est pas toujours le rapport d'opposition que l'on croit. Où l'on voit ce que représente le monstre dans l'Antiquité (forces brutes, chaotiques, cruauté, barbarie...) et comment le héros s'oppose à lui en figure civilisatrice mais aussi ambiguë, car lui aussi est un être hybride, et donc plus encore "aux limites de l'humain", comme ils disent...
    On y trouvera les hécatonchires ou la menace de retour au chaos, Lycaon, Thésée et le Minotaure, Bellérophon et la Chimère, mais aussi Achille que la fureur rend insensible à la pitié et cruel au-delà de toute mesure.

    chapitre 6 : L'Odyssée. C'est le même chapitre que précédemment, mais amélioré (enfin j'espère), enrichi, notamment d'une véritable étude transversale qui retrace le parcours d'Ulysse de la guerre à la paix, du guerrier pillant et massacrant au roi plein de pitié.

    chapitre 7 : L'aventure. Travail modeste sur les codes du roman d'aventure. Nous avons repris certains extraits de l'ancien volume de 5e qui marchaient très bien et nous semblaient transposables en 6e : le Doyle (avec les dinosaures), l'extrait d'Oliver Twist, celui de Bilbo, et ajouté d'autres extraits accessibles à des Sixième : Tom Sawyer, Sans Famille, L'Enfant et la rivière, quelques planches de Tintin.

    chapitre 8 : étude intégrale d'un classique de l'aventure accessible aux Sixième, qui figurait d'ailleurs déjà dans l'ancienne édition : Le Livre de la jungle. Davantage axé sur la dimension initiatique du roman.

    chapitre 9 : De la fable au fabliau, renard et ses compères. La figure du renard et de quelques autres animaux pour parler de l'homme. Extraits d'Ésope, La Fontaine, trois extraits du Roman de Renart (déjà dans TDL 5e) et une étude du film de Wes Anderson adapté de Roald Dahl, Fantastic Mister Fox.

    chapitre 10 : Le Médecin malgré lui. C'est le même chapitre que dans l'édition précédente, ne vous occupez pas de l'étiquette "ruses et masques" qu'on lui a collé.

     

    Sommaire détaillé des chapitres 1 à 4 : 

    Télécharger « TerreDesLettres_Sommaire_6eme_2016_1-2-3-4.pdf » (grand format)

    Télécharger « TDL_6eme_Somm_1_2.PNG » (petit format)

     

     

    Terre des Lettres résiste... (Véronique Marchais)

    Sommaire de Terre des Lettres 5e

    chapitre 1 : la poésie
    Deux thèmes : "le voyage" (bon, OK, c'était téléphoné, mais on a essayé de faire dans la qualité : Heureux qui comme Ulysse, Ma Bohème, Les Conquérants, Fantaisie...) et "contempler le monde, inventer des mondes" : Hugo (Une nuit qu'on entendait la mer sans la voir), Laforgue (méditation grisâtre), Verlaine (Soleils couchants), Musset (Ballade à la lune, Cadou (Celui qui entre par hasard...)

    chapitre 2 : l'enfant et les autres. L'émergence du personnage de l'enfant dans la littérature et ses enjeux, la mise en scène de l'émotion et d'un regard naïf qui permet une distance critique sur le monde. Avec Le petit Nicolas, une nouvelle de Colette, une de Maupassant (Le papa de Simon), un extrait accessible de Vipère au poing, Jeanne était au pain sec, et deux articles de presse sur le harcèlement à l'école (notre concession à l'EMC, faut bien...).

    En transition, l'étude du film de P. Brook Sa Majesté des mouches, entre récit sur l'enfance et abord des robinsonnades.

    chapitre 3 : étude intégrale de L'Île au trésor.

    Un dossier sur Jules Verne et les grandes figures de ses romans : le savant explorateur (Voyage au centre de la Terre), Philéas Fogg et le capitaine Némo. Le XIXe siècle, le positivisme, le développement des sciences, et comment tout cela nourrit l'imaginaire romanesque.

    chapitre 4 : l'appel de l'aventure, GT avec Mark Twain (Huckleberry Finn), J. London, Saint-Exupéry, un extrait de Sylvain Tesson et Sensation de Rimbaud en prolongement. Ici, il s'agit moins de travailler sur les codes de l'aventure ou l'initiation que sur l'aventure comme expérience des limites qui conduit à s'interroger sur soi et sur ses valeurs.

    chapitre 5 : le héros. Comment la figure du héros évolue-t-elle au fil du temps ? On commence avec Achille, on poursuit avec la matière de France (deux extraits de Roland), puis la matière de Bretagne (Arthur, Lancelot, Perceval), et une ouverture sur le super-héros, héritier de tout cela à la fois.

    chapitre 6 : étude intégrale de Tristan et Iseut.

    Un dossier sur la Renaissance, avec une étude intégrale de Gargantua (attention, seulement deux extraits dans le manuel lui-même).

    chapitre 7 : grands explorateurs réels ou imaginaires - parce que faire tout un chapitre sur Marco Polo, bof bof, quoi. Nous avons préféré montrer en quoi le récit de voyage, développé entre le XVe et le XVIIIe siècle, devient un genre à part entière nourrissant l'imaginaire romanesque de Verne, Doyle (ses Mondes perdus), Bradbury... avec le constat que cette exploration de mondes étrangers est toujours, in fine, un regard sur soi, évidemment.

    Un dossier sur Enfer et Paradis : les Enfers dans la mythlogie gréco-romaine, l'influence de Virgile, le jardin d'Eden, l'âge d'or, la quête d'un paradis terrestre dans une nature refuge, avec toujours Virgile, père de la poésie lyrique telle qu'elle est encore célébrée par Hugo, par exemple.

    chapitre 8 : Les Fourberies de Scapin. Même chapitre que précédemment, dûment étiqueté "famille, amis, réseaux..." Suspect

    chapitre 9 : le renouveau du conte merveilleux. Pour ne pas être redondants avec la Sixième, et ouvrir en fin d'année vers la 4e, nous avons choisi de travailler sur des contes satiriques, en particulier avec une étude intégrale de Gulliver à Lilliput. En prolongement, les Habits neufs de l'empereur (Andersen) et le film Le Roi et l'Oiseau.

    chapitre 10 : L'homme et la nature (si, si, on l'a fait) : travail sur le mythe de Déméter (le mythe), les cultes antiques, découverte de Thoreau et de Pierre Rhabi. Un article sur Monsantos.

     

    LES NOUVELLES VERSIONS POUR LA 4e ET LA 3e PARAÎTRONT L'ANNÉE PROCHAINE.

     

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    Le refus des compétences

    @miss isa a écrit:
    Socle : le nouveau programme de français est soclé, contrairement au précédent. L’appliquer, c’est appliquer le socle. On choisit de mentionner le mot, ou pas.

    Compétences : progresser en expression orale, en expression écrite, en lecture… suppose d’acquérir des savoir-faire, des connaissances, de la culture, des compétences (« Exploiter des lectures pour enrichir son écrit » est une compétence des IO de français qui n’a rien de scandaleux, et les sommaires des TDL formulent des compétences en écriture, bien heureusement). Là encore, on choisit de mentionner le mot, ou pas.


    Véronique Marchais : Non. Ce n'est pas juste refuser de mentionner le mot. C'est tourner le dos à la démarche. Je ne sais pas si "exploiter des lectures pour enrichir son récit" est une compétence qui n'a rien de scandaleux. Je sais qu'à mes yeux, c'est si vague que ça ne veut rien dire et que c'est inexploitable.
    Je ne sais évidemment pas ce qu'il en sera pour les autres manuels (bon, celui que tu cites se revendique des compétences) mais l'autre manuel de Nathan prétend partir des compétences pour son travail. Dans TDL, on ne trouvera même pas le mot, parce que nous préférons ignorer ce bouzin. Nous ne voyons pas l'intérêt de coller partout, à chaque rédaction "exploiter ses lectures pour enrichir son récit". Et c'est un vrai choix, que tous n'ont pas fait, manifestement.

    Le socle de compétence participe de la bureaucratisation du métier, de la perte de temps et de sens, de l'évaluation transformée en mensonge à force de dilution, mensonge qui permet de continuer de dégrader les contenus d'enseignement sans que rien ne transparaisse - ou si peu. Les élèves ne savent plus écrire, mais on n'a jamais eu autant de DNB avec mention. Tout va bien.

    Ton discours, finalement, marque bien la différence entre ceux qui choisissent TDL et les autres.

    source : http://www.neoprofs.org/t100457p175-des-nouvelles-de-terre-des-lettres

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