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La bavarde (Natha Caputo)

 

Auteur : Natha Caputo.

Niveau : Niveau 3 (CE2).

Manuel : Giraudin, Vigo, L'Oiseau-Lyre CE2.

 

La bavarde

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I Une découverte embarrassante

La bavarde (Natha Caputo)

1 Il était une fois une bonne vieille paysanne bavarde comme une pie. Il n'était rien qu'elle pût garder pour elle. À peine apprenait-elle quelque chose que la langue lui démangeait. Elle courait alors tout raconter à ses voisines et elle mettait tout le village entier au courant de la nouvelle. Et si encore elle s'était contentée de redire ce qu'elle avait entendu ! Mais pensez-vous ! Elle brodait, elle ajoutait, et la moindre petite histoire passant par sa bouche se transformait en une incroyable aventure.

 

2 Un jour que son vieux paysan de mari ramassait du bois dans la forêt, il posa le pied sur une motte de terre. La motte de terre s'effondra et son pied s'enfonça dans un trou.

« Que peut-il bien y avoir là? » se demanda le vieux. Il cassa une branche et fouilla dans le trou.

Et voilà qu'il découvrit un petit chaudron. Et ce petit chaudron était rempli de pièces d'or.

 

3 « Quelle aubaine ! pensa le vieux. Mais comment l'emporter à la maison ? Si ma vieille bavarde de femme voit le chaudron, elle ira tout raconter à tout le monde. Et je n'aurai que des ennuis... »

Le vieux s'assit sur une souche et se mit à réfléchir.

Il réfléchit une heure, il réfléchit deux heures, puis il enterra de nouveau le chaudron et rentra chez lui sans rien dire.

 

4 Le lendemain matin, il se leva tôt et prit dans le buffet toute une pile de galettes que sa femme avait préparées la veille. Puis il alla au clapier où il attrapa un gros lapin.

Et enfin, dans le bassin du jardin du seigneur, il pêcha la plus grosse truite.

Et il retourna dans la forêt.

 

5 Tout le long du sentier, il attacha les galettes aux branches des buissons. La truite, il l'accrocha au sommet d'un haut sapin. Quant au lapin, il le mit dans une nasse et le plongea dans la rivière.

Puis il revint chez lui.

 

II Des choses étonnantes

 

1 « Il m'arrive une aventure extraordinaire ! s'écria le vieux paysan en entrant dans sa petite maison. Imagine-toi, chère bonne vieille femme... Mais si je te le dis, tu iras le raconter partout !

— Non, non, cher petit vieux, je te le promets — je ne dirai rien à personne — mais raconte vite, vite !

— Eh bien, voilà... Mais c'est sûr ? Tu ne le diras à personne ?

— À personne, à personne ! répéta la vieille.

— Eh bien... dans la forêt... dans un trou... j'ai trouvé un chaudron rempli de pièces d'or...

 

2 — Grands dieux ! s'écria la vieille. Allons le chercher tout de suite !

— Prends bien garde à ce que tu diras, reprit le vieux. Sinon, nous aurons des ennuis !

— Oui, oui... c'est entendu ! répondit la vieille avec impatience. Je ne dirai rien de plus que toi. Mais allons vite, je t'en prie ! » Le vieux paysan conduisit donc sa femme dans la forêt.

 

3 Chemin faisant, elle aperçut les galettes qui se balançaient aux branches des buissons.

« Regarde, petit père, dit-elle, regarde ! A-t-on jamais vu chose pareille! Il y a des galettes aux branches !

— Eh quoi ! répondit tranquillement le vieux, après avoir regardé. C'est tout simple ! Un nuage de galettes aura passé par là cette nuit et aura crevé au-dessus de la forêt... »

La vieille s'émerveilla et ne dit plus rien.

 

4 Ils poursuivirent leur chemin. Et tout à coup, la vieille aperçut la truite au sommet du sapin.

« Petit père, petit père, arrête-toi ! cria-t-elle.

— Eh bien, quoi ? dit le vieux. Que regardes-tu ? Dépêchons-nous, voyons !

— Mais n'as-tu pas vu, petit père ? Il y a une truite en haut du sapin !

— Ah ! dit tranquillement le vieux. Tant mieux ! Attends-moi un instant. Je vais grimper la chercher. Nous la ferons cuire pour le dîner. »

Et le vieux paysan grimpa sur l'arbre et décrocha la truite.

Et la vieille paysanne s'émerveilla encore une fois.

 

5 Ils continuèrent leur chemin. Bientôt, ils furent devant la rivière.

« Puisque nous sommes là, dit le vieux, regardons dans la nasse. » Il regarda dans la nasse et poussa un cri de joie.

« Quelle chance ! il y a un lapin dans la nasse !

— Es-tu fou? demanda la vieille. Depuis quand les lapins se prennent-ils à la nasse ?

— C'est pourtant comme ça, répondit tranquillement le vieux. Nous aurons un bon civet dimanche. » Et il prit le lapin et le fourra dans son sac.

 

III Le seigneur s'en mêle

 

1 Ils arrivèrent enfin à l'endroit où était enterré le chaudron avec l'or, le déterrèrent et le rapportèrent à la maison.

La nuit tombait. Il faisait déjà sombre. Non loin de là, un troupeau rentrait à l'étable et les vaches meuglaient.

« Tu entends les vaches, petit père ? dit la vieille paysanne.

— Des vaches ? Quelles vaches ? répondit le vieux paysan. Ce sont les diables qui rossent notre maître et c'est lui qui crie. »

 

2 Un peu plus loin, la vieille reprit :

« Et cette fois, petit père, n'entends-tu pas les bœufs qui beuglent ?

— Des bœufs ? Quels bœufs ? Je te dis que ce sont les diables qui rossent notre maître et c'est lui qui crie ! »

Rentrés chez eux, les deux vieux paysans cachent soigneusement l'or.

 

3 La vieille femme se tait un jour, se tait deux jours mais elle n'y peut plus tenir. Elle se précipite le troisième jour chez ses voisines, chuchote la nouvelle aux unes, donne des détails aux autres, raconte toutes sortes de merveilles. Ce n'est plus un petit chaudron mais un gros, ce n'est plus un gros chaudron mais une marmite, ce n'est plus une marmite mais un tonneau.

 

4 Et de voisine en voisine, de bouche en bouche, l'incroyable aventure fait le tour du village. Elle arrive jusqu'aux oreilles du gardien du château qui la raconte aux cuisiniers qui la racontent aux domestiques qui la racontent au seigneur lui-même.

Le seigneur se rendit chez le vieux paysan.

« Ainsi, vieux renard, lui dit-il, tu trouves de l'or sur mes terres et tu le gardes pour toi ? Rends-le moi immédiatement, il m'appartient.

 

5 — De l'or ? répondit le paysan, je vous assure, Maître, que je n'ai pas trouvé d'or, pas la moindre piécette ! C'est encore cette pie bavarde qui sera allée raconter des histoires !

— Comment, pie bavarde ! se fâche la vieille paysanne. Ce n'est pas vrai, peut-être, que tu as trouvé un tonneau plein d'or ?

— Allons, dit le seigneur, tu vois bien. Rends-moi cet or, sinon il t'en cuira...

 

IV Une femme qui raconte n'importe quoi

 

1 — Mais où voulez-vous que je prenne cet or ? gémit le rusé paysan. Interrogez ma femme et vous verrez que tout cela n'existe pas...

— Eh bien, dit le seigneur, je t'écoute, ma brave femme. Raconte-moi tout.

— Voilà, Maître, dit la vieille. Nous sommes allés au bois juste après que le nuage de galettes a crevé. Il y avait encore des galettes accrochées à toutes les branches...

 

2 — Qu'est-ce que tu racontes ? s'étonna le seigneur.

— C'est comme je vous le dis, Maître. Il y avait des galettes accrochées comme des feuilles et puis nous sommes arrivés devant un sapin où poussait une truite...

— Vous voyez bien, Maître, qu'elle ne sait ce qu'elle dit s'écria le vieux paysan.

 

3 — Si, je sais ce que je dis, cria la vieille se fâchant de nou­veau. La truite poussait tout en haut du sapin. Et après, dans la rivière, nous avons trouvé un lapin pris dans la nasse...

— Comment ça, dit le seigneur, un lapin dans la rivière?

— Maître ! N'écoutez plus ses sornettes, dit le vieux.

 

4 — Tais-toi ! cria la vieille de plus en plus fâchée. Ce ne sont pas des sornettes. Et c'est à côté de la rivière que nous avons déterré l'or et nous l'avons rapporté à la maison juste au moment où les diables rossaient le Maître...

— Qu'est-ce que tu dis ? cria à son tour le seigneur, furieux.

— Oui, parfaitement, je me rappelle très bien que c'était le soir où les diables vous rossaient, Maître...

 

5 — Mais ta femme raconte n'importe quoi ! dit le seigneur

— Je vous l'avais bien dit, Maître », répondit le paysan.

Mais le seigneur était déjà parti en claquant la porte.

Et le vieux paysan garda son trésor.

Il paraît, tout de même, que depuis cette histoire, la vieille paysanne sait un peu mieux tenir sa langue...

 

(NATHA CAPUTO, Contes des quatre Vents, Fernand Nathan)

 

La bavarde (Natha Caputo) : le paysan rusé

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