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La tabatière (Voltaire)

Tout enfant, Voltaire faisait si facilement les vers que ses professeurs eux-mêmes, prenaient plaisir a exercer son jeune talent. Un jour, il s'amusait pendant la classe avec une tabatière; son professeur le père Porée la lui confisqua, et promit de la lui rendre, s'il faisait la demande en vers. Un quart d'heure après, l’écolier remettait les vers suivants :

Adieu, ma pauvre tabatière ;
Adieu, je ne te verrai plus ;
Ni soins, ni larmes, ni prière,
Ne te rendront à moi ; mes efforts sont perdus.
Adieu, ma pauvre tabatière ;
Adieu, doux fruit de mes écus !
S’il faut à prix d’argent te racheter encore,
J’irai plutôt vider les trésors de Plutus.
Mais ce n’est pas ce dieu que l’on veut que j’implore.
Pour te ravoir, hélas ! il faut prier Phébus…
Qu’on oppose entre nous une forte barrière !
Me demander des vers ! Hélas ! Je n’en puis plus.
Adieu, ma pauvre tabatière ;
Adieu, je ne te verrai plus.

Voltaire (1694-1778)

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