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Le chien de Brisquet (Charles Nodier)
En notre forêt de Lyons, tout près d'un grand puits, il y avait un bonhomme, bûcheron de son état, qui s'appelait Brisquet, ou autrement le fendeur à la bonne hache.
Il vivait pauvrement du produit de ses fagots avec sa femme, qui s'appelait Brisquette. Ils avaient deux petits enfants, un petit garçon de sept ans, qui était brun et qui s'appelait Biscotin, et une blondine de six ans, qui s'appelait Biscotine.
Outre cela, ils avaient un chien à poil frisé, noir par tout le corps, sauf au museau qu'il avait couleur de feu. C'était bien le meilleur chien du pays pour son attachement à ses maîtres. On l'appelait la Bichonne.
Auteur : Charles Nodier.
Niveau : Niveau 3 (CE2).
Manuel : Giraudin, Vigo, L'Oiseau-Lyre CE2.
Autre version pour le CE2 : chapitre de Mareuil, Au pays des contes CE2.
Le chien de Brisquet
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I Un terrible hiver
1 En notre forêt de Lyons, tout près d'un grand puits, il y avait un bonhomme, bûcheron de son état, qui s'appelait Brisquet, ou autrement le fendeur à la bonne hache.
Il vivait pauvrement du produit de ses fagots avec sa femme, qui s'appelait Brisquette. Ils avaient deux petits enfants, un petit garçon de sept ans, qui était brun et qui s'appelait Biscotin, et une blondine de six ans, qui s'appelait Biscotine.
2 Outre cela, ils avaient un chien à poil frisé, noir par tout le corps, sauf au museau qu'il avait couleur de feu. C'était bien le meilleur chien du pays pour son attachement à ses maîtres. On l'appelait la Bichonne.
Cette année-là, il y eut de grandes neiges et beaucoup de loups dans la forêt. Les pauvres gens avaient bien de la peine à vivre. Ce fut une terrible désolation dans le pays.
Mais Brisquet allait toujours à la besogne : il ne craignait les loups, à cause de sa bonne hache. En partant, il disait à Briquette :
« Femme, je vous prie de ne laisser courir ni Biscotin ni Biscotine tant que M. le grand louvetier ne sera pas venu. Il y aurait danger pour eux. Ils ont assez d'espace pour marcher entre la butte et l'étang. Je vous prie aussi, Brisquette, de ne pas laisser partir la Bichonne qui ne demande qu'à trotter. »
Brisquet disait tous les matins la même chose à Brisquette. Un soir, il n'arriva pas à l'heure ordinaire. Brisquette venait sur le pas de la porte, rentrait, ressortait et disait :
« Mon Dieu, qu'il est attardé !... » Puis elle sortait encore en criant :
« Eh ! Brisquet ! »
3 Et la Bichonne lui sautait jusqu'aux épaules, comme pour lui dire :
« N'irai-je pas au-devant de mon maître ?
– Paix, lui dit Brisquette... Écoute, Biscotine, va vers la butte pour voir si ton père ne revient pas... Et toi, Biscotin, suis le chemin au long de l'étang, et crie bien fort : « Brisquet !... Brisquet !... » Paix ! la Bichonne!»
Les enfants partirent et allèrent, allèrent...
II Le courage de la Bichonne
1 Quand les enfants se furent rejoints à l'endroit où le sentier de l'étang vient couper celui de la butte :
« Mordienne, dit Biscotin, je retrouverai notre pauvre père, ou les loups m'y mangeront.
– Pardienne, dit Biscotine, ils m'y mangeront bien aussi. » Pendant ce temps-là, Brisquet était revenu par le grand chemin de Puchay, parce qu'il avait une hottée de petits fagots à fournir chez Jean Pâquier.
2 « As-tu vu nos enfants ? lui demanda Brisquette.
– Nos enfants ! dit Brisquet, nos enfants ? mon Dieu! sont-ils sortis ?
– Je les ai envoyés à ta rencontre jusqu'à la butte et à l'étang, mais tu as pris un autre chemin. »
Brisquet ne posa pas sa bonne hache. Il se mit à courir du côté de la butte.
« Si tu emmenais la Bichonne ? » lui cria Brisquette. La Bichonne était déjà bien loin.
3 Elle était si loin que Brisquet la perdit bientôt de vue. Il avait beau crier: « Biscotin ! Biscotine ! », on ne lui répondait pas. Alors il se prit à pleurer, parce qu'il s'imagina que ses enfants étaient perdus.
Après avoir couru longtemps, il lui sembla reconnaître la voix de la Bichonne. Il marcha droit dans le fourré, à l'endroit où il l'avait entendue, et il y entra, sa bonne hache levée.
4 La Bichonne était arrivée là, au moment où Biscotin et Biscotine allaient être dévorés par un gros loup. Elle s'était jetée devant en aboyant, pour que ses abois avertissent Brisquet.
Brisquet, d'un coup de sa bonne hache, renversa le loup raide mort. Mais il était trop tard pour la Bichonne, elle ne vivait déjà plus.
Brisquet, Biscotin et Biscotine rejoignirent Brisquette. C'était une grande joie, et cependant tout le monde pleura. Il n'y avait pas un regard qui ne cherchât la Bichonne.
5 Brisquet enterra la Bichonne au fond de son petit jardin, sous une grosse pierre, sur laquelle le maître d'école écrivit :
C'est ici qu'est la Bichonne,
Le pauvre chien de Brisquet.
Et c'est depuis ce temps-là qu'on dit, en commun proverbe :
Malheureux comme le chien à Brisquet, qui n'allit qu'une fois au bois et que le loup mangit.
(Adapté de CHARLES NODIER, Contes, Garnier)
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