• Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    Pinokio, les cinq pièces d'or en poche, se mit en route pour rentrer à la maison.

    Il n'avait pas fait cinq cents mètres qu'il rencontra dans la rue un Renard boiteux et un Chat aveugle, qui s'en allaient clopin­-clopant, s'aidant l'un et l'autre en bons compagnons de malheur.

    Le Renard marchait en s'appuyant sur le Chat. Et le Chat se laissait guider par le Renard.

    « Bonjour, Pinokio ! » dit le Renard en saluant gracieusement.

     

    Auteur : Carlo Collodi (1826-1890).

    Niveau : Niveau 3 (CE2).

    Manuel : Giraudin, Vigo, L'Oiseau-Lyre CE2.

     

    Pinokio et les cinq pièces d'or

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    I Une mauvaise compagnie

     

    Pinokio est un pantin qu'un homme vieux et très pauvre, Geppetto, a taillé dans un morceau de bois. Ce pantin qui sait parler et qui se déplace tout seul, est paresseux, menteur et toujours prêt à faire des sottises. Cependant, il a bon cœur et il aime bien son papa Geppetto.

    Celui-ci, qui veut envoyer Pinokio à l'école, lui a acheté un alphabet. Mais Pinokio vend son livre pour aller voir les marion­nettes. Pendant la séance, la présence du pantin cause beaucoup de désordre parmi les acteurs, et le directeur du théâtre, Man­gefeu, très en colère, parle de faire brûler Pinokio.

    Finalement, il se radoucit et, tout ému par ce que lui raconte Pinokio, il donne à celui-ci cinq pièces d'or pour Geppetto.

     

    1 Naturellement, Pinokio remercia chaudement Mangefeu. Il embrassa, l'une après l'autre, toutes les marionnettes de la troupe, même les gendarmes. Puis, ne se tenant plus de joie, il se mit en route pour rentrer à la maison.

    Il n'avait pas fait cinq cents mètres qu'il rencontra dans la rue un Renard boiteux et un Chat aveugle, qui s'en allaient clopin­-clopant, s'aidant l'un et l'autre en bons compagnons de malheur.

    Le Renard marchait en s'appuyant sur le Chat. Et le Chat se laissait guider par le Renard.

    « Bonjour, Pinokio ! dit le Renard en saluant gracieusement.

    - Comment sais-tu mon nom ? demanda le pantin.

    - Je connais très bien ton père.

    - Où l'as-tu vu?

    - Je l'ai vu hier soir sur le seuil de sa maison.

    - Et que faisait-il ?

    - Il était en manches de chemise et il grelottait.

    - Pauvre papa ! Grâce à Dieu ! à partir d'aujourd'hui il ne grelottera plus.

    - Pourquoi ?

    - Parce que je suis devenu un grand seigneur.

    - Toi, un grand seigneur ? » s'exclama le Renard, qui se mit à rire.

    3 Le Chat riait aussi, mais, pour ne pas le montrer, il lissait sa moustache avec ses pattes de devant.

    « Il n'y a pas de quoi rire, s'écria Pinokio irrité. Bien que je n'aie pas envie de vous mettre l'eau à la bouche, je puis pourtant vous dire que je possède cinq beaux écus d'or. »

    Et il sortit les pièces d'or que Mangefeu lui avait données.

    Au doux son de l'or, le Renard allongea involontairement celle de ses jambes qui semblait raidie ; le Chat ouvrit tout grands ses deux yeux qui ressemblèrent soudain à deux lanternes vertes ; mais il les referma aussitôt ; si bien que Pinokio ne s'aperçut de rien.

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    4 « Et maintenant, interrogea le Renard, que vas-tu faire de cet or ?

    - Avant tout, répondit Pinokio, je veux acheter pour mon papa un beau paletot neuf, tout en or et en argent avec des boutons de diamant. J'achèterai ensuite un alphabet pour moi.

    - Pour toi ?

    - Assurément, car je veux aller à l'école et travailler sérieusement.

    - Dieu t'en garde ! dit le Renard. C'est pour avoir eu la sotte passion de l'étude que j'ai perdu une jambe !

    - Dieu t'en garde ! dit le Chat. C'est pour avoir eu la sotte passion de l'étude que j'ai perdu la vue de mes deux yeux. »

     

    5 Au même instant, un Merle blanc, qui se tenait perché sur la haie voisine, fit entendre son sifflement habituel et dit :

    « Pinokio, n'écoute pas les conseils de la mauvaise compagnie ; sinon, tu t'en repentiras ! »

    Pauvre Merle ! Il eût mieux fait de ne rien dire ! Le Chat fit un grand saut et s'élança sur lui ; sans même lui donner le temps de dire « Aïe ! », il l'avala d'une seule bouchée, les plumes et le reste.

     

    II Comment doubler sa fortune

     

    1 Ils étaient arrivés à moitié chemin, quand le Renard, s'arrêtant soudain, dit à Pinokio:

    « Veux-tu doubler ta fortune ?

    - Qu'est-ce à dire ?

    - Veux-tu, de cinq misérables écus, en faire cent, mille, de mille !

    - Plaise à Dieu !... Mais comment ?

    - Le moyen est bien simple. Au lieu de retourner chez toi, viens avec nous.

    - Et où me conduirez-vous ?

    - Au Pays des Nigauds. »

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    2 Pinokio réfléchit un instant, puis, résolument, il dit :

    « Non, je ne veux pas y aller ! Maintenant, je suis tout près de chez moi. Je veux rentrer à la maison où m'attend papa. Dieu sait combien le pauvre vieux a dû avoir de chagrin, hier, en ne me voyant pas revenir...

    — Donc, dit le Renard, tu veux absolument rentrer chez toi. Alors, va-t'en, et tant pis pour toi !...

    — Tant pis pour toi ! répéta le Chat.

    — Réfléchis bien, Pinokio; c'est la fortune que tu repousses.

    — C'est la fortune ! répéta le Chat.

    — Tes cinq écus deviendraient deux mille écus d'aujourd'hui à demain.

    — Deux mille écus ! répéta le Chat.

    — Mais comment pourraient-ils augmenter aussi vite ? demanda Pinokio, la bouche ouverte de stupéfaction.

     

    3 — Je vais tout de suite te l'expliquer, dit le Renard. Sache bien qu'il existe, au Pays des Nigauds, un champ sacré que l'on appelle le Champ des Miracles. Tu fais dans ce champ un petit trou et tu mets dans ce trou un écu d'or, par exemple ; puis tu recouvres le trou avec un peu de terre ; tu arroses la terre avec deux seaux d'eau de fontaine ; tu jettes dessus une pincée de sel et, le soir, tu vas tranquillement te mettre au lit. Pendant la nuit, l'écu germe et fleurit et, le lendemain matin, à ton lever, tu retournes au Champ des Miracles. Qu'y trouves-tu ? Tu trouves un bel arbre chargé d'autant d'écus d'or qu'un bel épi peut contenir de grains au mois de juin.

     

    4 — Ainsi donc, dit Pinokio, toujours un peu ahuri, si j'enterrais dans ce champ mes cinq écus d'or, combien en trouverais-je demain matin?

    — C'est un calcul facile à faire, dit le Renard. Suppose que chaque écu te donne une grappe de cinq cents écus. Multiplie cinq cents par cinq et le lendemain matin tu te trouveras posses­seur de deux mille cinq cents écus.

    — Oh ! quel miracle, s'écria Pinokio en sautant de joie. Dès que j'aurai recueilli ces écus, j'en prendrai deux mille pour moi et je vous ferai cadeau à vous deux des cinq cents autres.

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    5 — Un cadeau, à nous ! s'exclama le Renard avec dédain et comme offensé. Dieu t'en garde !

    — Dieu t'en garde ! répéta le Chat.

    — Nous, reprit le Renard, nous ne travaillons pas par intérêt; nous travaillons pour enrichir les autres.

    — Les autres, répéta le Chat.

    — Quels braves gens ! » pensa en lui-même Pinokio. Et, oubliant subitement son père, le paletot neuf, l'alphabet et toutes les bonnes résolutions qu'il avait prises, il dit au Renard et au Chat :

    « Partons, je vais avec vous ! »

     

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

     

    III Deux étranges brigands

     

    Le Renard et le Chat emmènent Pinokio dîner à l'auberge de l'Écrevisse Rouge. Puis tous se couchent, mais le Renard et le Chat partent, sans rien payer, avant que Pinokio ne s'éveille. Le pantin doit donner un écu d'or à l'aubergiste. Il ne lui en reste donc plus que quatre.

    À minuit, Pinokio quitte à son tour l'auberge, par un brouillard si épais qu'on n'y voit pas à deux pas. « Vais-je rencontrer des brigands ? » se demande Pinokio.

     

    1 Il se retourna et vit dans l'obscurité deux vilains hommes noirs, la tête enveloppée dans des sacs à charbon et qui couraient derrière lui en sautillant sur la pointe des pieds, comme des fantômes.

    « Les voici vraiment ! » se dit Pinokio qui, ne sachant où cacher ses quatre écus, les plaça dans sa bouche, sous sa langue.

    Puis, il essaya de fuir. Mais il n'avait pas encore fait un pas qu'il se sentit saisir par le bras et qu'il entendit deux voix terribles et caverneuses qui lui disaient :

    « La bourse ou la vie ! »

     

    2 Pinokio, ne pouvant parler puisqu'il avait les écus dans la bouche, gesticula pour faire comprendre aux deux brigands, dont on voyait tout juste les yeux par les trous des sacs, qu'il était qu'un pauvre pantin n'ayant même pas un centime faux en poche.

    « Allons ! trêve d'explications. C'est de l'argent qu'il nous faut ! » crièrent les deux brigands menaçants.

    Mais Pinokio fit de la tête et des mains un signe qui voulait dire : « Je n'en ai pas. »

     

    3 « Sors l'argent ou tu es mort, dit le plus grand des deux assassins.

    — Mort ! répéta l'autre.

    — Et après t'avoir tué, nous tuerons aussi ton père.

    — Aussi ton père !

    — Non, non, ne tuez pas mon pauvre papa, non! » cria Pinokio d'une voix désespérée. Mais, à crier ainsi, les écus sonnèrent dans sa bouche.

    « Ah ! bandit ! Tu caches ton or sous ta langue. Crache-le vite ! »

    Pinokio tint bon.

    « Ah ! tu fais le sourd ? Attends un peu. Nous allons bien te faire cracher ! »

    En effet, l'un des deux saisit Pinokio par la pointe de son nez et l'autre par le menton et ils commencèrent à le tirer violemment pour le forcer à ouvrir la bouche. Mais ce fut en vain. La bouche de Pinokio semblait clouée.

     

    4 Alors, le plus petit des assassins sortit un grand couteau et essaya d'en passer la lame, en guise de levier, entre les deux lèvres de l'infortuné Pinokio. Mais celui-ci, rapide comme l'éclair, lui saisit la patte entre ses dents et, après l'avoir mordue et coupée net, la cracha à terre. Figurez-vous quel fut alors l'étonnement de Pinokio quand il s'aperçut qu'au lieu d'une main c'était une patte de chat qu'il avait crachée.

    Encouragé par cette première victoire, il se débarrassa à coups d'ongles de ses brigands, franchit la haie et s'élança à travers champs. Les deux brigands se précipitèrent à sa poursuite, comme deux chiens après un lièvre, et celui qui avait perdu une patte courait, en sautant sur une jambe, sans qu'on pût savoir comment il s'y prenait.

     

    5 Après avoir ainsi parcouru quinze kilomètres, Pinokio était épuisé. Alors il se vit perdu et grimpa sur un pin très élevé puis s'assit au sommet, sur la plus haute branche. Les assassins essayèrent de grimper à leur tour, mais, arrivés à la moitié du tronc, ils glissèrent et tombèrent par terre en s'écorchant les mains et les pieds.

    Ils ne se tinrent pourtant pas pour battus. Ayant ramassé au pied de l'arbre un morceau de bois sec, ils y mirent le feu. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, le pin s'enflamma et brûla comme une chandelle au souffle du vent. Pinokio, voyant monter les flammes et ne voulant pas mourir à la façon d'un pigeon rôti, fit un grand saut et décampa à travers les vignes et les champs.

    Les brigands le poursuivirent, infatigables.

     

    IV Au champ des miracles

     

    Les bandits finissent par rattraper Pinokio et ils le pendent à la branche d'un grand chêne. Il est sauvé par une belle jeune fille aux cheveux bleus (il s'agit d'une Fée) qui le soigne et le guérit.

    Pinokio prend le chemin de la forêt pour aller retrouver son papa. Mais, que rencontre-t-il en route? Le Chat, à qui il manque une patte, et le Renard.

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    1 « Et maintenant que fais-tu en ce lieu ? demanda le Renard à Pinokio.

    — J'attends mon papa qui doit passer par ici d'un moment à l'autre.

    — Et tes écus d'or ?

    — Je les ai toujours dans ma poche, moins un que j'ai dépensé à l'auberge de l'Écrevisse Rouge.

    — Et dire qu'au lieu de quatre écus, tu pourrais en avoir demain mille et deux mille ! Pourquoi restes-tu sourd à mes conseils ? Pourquoi ne vas-tu pas semer tes écus dans le Champ des Miracles ?

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

    2 « Aujourd'hui, c'est impossible; j'irai un autre jour.

    — Un autre jour !... ce sera trop tard ! dit le Renard.

    — Pourquoi ?

    — Parce que ce champ a été acheté par un grand seigneur et, dès demain, il ne sera plus permis à personne d'y semer de l'argent.

    — À quelle distance se trouve le Champ des Miracles ?

    — À deux kilomètres à peine. Veux-tu venir avec nous ? Dans une demi-heure, nous y sommes. Tu sèmes bien vite tes écus d'or et, peu de temps après, tu en récoltes deux mille. De sorte que, ce soir, tu reviens ici les poches pleines. Veux-tu venir avec nous ? »

     

    3 Pinokio hésita un peu à répondre, car l'image de la bonne Fée lui revint à l'esprit. Il pensa aussi à son vieux père. Mais il finit par faire ce que font tous les enfants qui n'ont pas pour un sou de cœur ni de jugement. Finalement, il haussa les épaules et dit au Renard et au Chat :

    « Allons-nous-en. Je vais avec vous. »

    Et ils partirent.

    Après avoir marché pendant une demi-journée, ils arrivèrent dans un village qu'on appelait Attrape-Nigauds...

    « Mais où se trouve donc le Champ des Miracles?

    — À deux pas d'ici. »

     

    4 En effet, ils traversèrent le village, et, quand ils furent hors des murs, ils s'arrêtèrent dans un champ solitaire qui ressemblait en tous points aux autres champs.

    « Nous voici arrivés, dit le Renard à Pinokio. Maintenant, baisse-toi et creuse avec tes mains un petit trou dans la terre pour y mettre tes pièces d'or. »

    Pinokio obéit. Il creusa un trou, y posa les quatre écus d'or, les y laissa et recouvrit le trou avec un peu de terre.

    « Maintenant, dit le Renard, va au canal tout près d'ici. Prends un seau d'eau et arrose la terre à l'endroit où tu as semé. »

     

    5 Pinokio s'en fut au canal. Mais, comme il n'avait pas de seau, il enleva une de ses savates, la remplit d'eau, et revint arroser la terre qui couvrait le trou. Puis il demanda :

    « N'y a-t-il rien d'autre à faire ?

    — Rien d'autre ! répondit le Renard. Maintenant, nous n'avons qu'à nous en aller. Toi, tu pourras revenir dans vingt minutes, et tu trouveras l'arbrisseau déjà sorti du sol avec ses rameaux tout chargés d'or. »

    Le pauvre Pinokio, fou de joie, remercia de tout cœur le Renard et le Chat, et leur promit un très beau cadeau.

    « Nous ne voulons pas de cadeau, répondirent les deux com­pères. Il suffit pour notre bonheur de t'avoir enseigné à t'enrichir sans trop de fatigue. »

    Cela dit, ils saluèrent Pinokio et, lui souhaitant bonne récolte, ils s'en allèrent de leur côté.

     

    V Rien !

     

    1 De retour au village, Pinokio commença à compter les minutes une à une.

    Quand le moment lui parut venu, il reprit bien vite le chemin qui conduisait au Champ des Miracles.

    Tandis qu'il marchait d'un pas hâtif, son cœur battait bien fort et faisait tic tac, tic tac, comme une grosse horloge qui marche bien.

     

    Et, tout en marchant, il pensait :

    « Si, au lieu de mille écus, j'en trouvais deux mille sur les branches de l'arbre !... Et si, au lieu de deux mille, j'en trouvais cinq mille !... Et si, au lieu de cinq mille, j'en trouvais cent mille !... Quel riche seigneur je deviendrais alors ! Je voudrais avoir un beau palais, mille chevaux de bois et mille écuries pour pouvoir me promener, une cave remplie de liqueurs, une chambre entière remplie de confiseries, de gâteaux, de petits pains, de pâte d'amandes et de gaufrettes. »

     

    2 Et, tout en faisant ces beaux projets, il arriva tout près du Champ des Miracles et s'arrêta pour regarder si, par hasard, il n'apercevrait pas déjà l'arbre aux rameaux chargés d'or. Mais il ne vit rien.

    Il fit quelques pas en avant : rien.

    Il entra dans le champ; il alla exactement jusqu'au petit trou où il avait enterré les écus : rien.

    Alors il devint pensif, et, perdant confiance, il sortit une main de sa poche et commença à se gratter longuement la tête.

    3 À ce moment même, il entendit non loin de ses oreilles un rire sonore. Se retournant légèrement, il aperçut sur un arbre un gros Perroquet qui se grattait les quelques plumes qui lui restaient.

    « Pourquoi ris-tu ? demanda Pinokio d'une voix irritée.

    — Je ris, parce qu'en me grattant je me suis chatouillé sous l'aile, en me nettoyant. »

    Pinokio ne répondit pas ; il alla au canal et remplit encore d'eau sa savate. Puis, de nouveau, il se mit à arroser la terre qui recouvrait les écus d'or.

     

    4 Mais voici qu'un autre rire, bien plus impertinent que le premier, se fit entendre dans le silence du champ.

    « Enfin, s'écria Pinokio, tout en rage, peut-on savoir, Perroquet grossier, pourquoi tu ris?

    — Je ris de ces niais qui croient à toutes les sottises et qui se laissent tromper par ceux qui sont plus fourbes qu'eux.

    — Tu parles peut-être pour moi.

    — Oui, je parle pour toi, mon pauvre Pinokio, pour toi qui es assez bête pour croire que les écus peuvent être semés et récoltés dans les champs, comme les flageolets, et les courges. Moi aussi, je l'ai cru autrefois. Et aujourd'hui, j'en suis puni ! Aujourd'hui — mais il est trop tard ! — j'ai compris que, pour amasser honnêtement quelques sous, il faut savoir les gagner, soit par le travail de ses propre mains, soit par le travail de son cerveau.

     

    5 — Je ne te comprends pas, dit le pantin, qui commençait déjà à trembler de peur.

    — Patience ! je m'explique, ajouta le Perroquet. Pendant que tu étais au village, le Renard et le Chat sont venus dans ce champ. Ils ont déterré tes écus d'or, les ont pris et se sont enfuis comme le vent. Maintenant, bien habile qui les rattrapera ! »

    Pinokio resta bouche bée et, ne voulant pas croire aux paroles du Perroquet, il commença de creuser avec ses ongles la terre qu'il avait arrosée. Il creusa, creusa, creusa !...

    Il fit un trou si profond qu'on aurait pu faire tenir, toute droite, une botte de paille.

    Mais les écus n'étaient pas là.

     

    Pinokio connaîtra encore bien des mésaventures avant de retrouver son papa. Mais, parce qu’il deviendra enfin obéissant et gentil, la Fée le changera en petit garçon.

     

    (Collodi, Les Aventures de Pinokio,

    Traduction faite par Mme la comtesse de Gencé sur l’édition originale, Albin Michel)

     

    Les images du manuel L'Oiseau-lyre CE2 : 

    Pinokio et les cinq pièces d'or (C. COLLODI)

     

     

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